Quelques éléments intéressants :
Page 46 : Levée de recrues dans le petit village de montagne du jeune Reza : « Il y eut une prière collective, des paroles patriotiques furent prononcée par le maire puis le lieutenant, et la trentaine d'hommes monta dans le camion … En quelques heures, notre bourgade avait été pratiquement privée de ses hommes. »
Page 84 : Reza et le mollah, ou comment aider à faire le premier pas : « - Es-tu prêt à devenir soldat ? - Pour le moment, je ne le pense pas… - Tu ne le penses pas. Et pourquoi ça ? - Parce que je pense que pour être soldat, il faut être grand, très fort et surtout savoir tirer avec une arme. - Tous les soldats ne font pas la guerre, tous n'ont pas un fusil, … »
Page 97 : La mère de Reza donne son opinion… : « Mais Reza, c'est la honte de la famille. Ses camarades de classes sont partis, lui est resté. Je ne sais plus quoi faire. Voilà pourquoi j'avais besoin de lancer cet appel [à la télévision régionale] : je veux qu'on vienne prendre mon fils et qu'on en fasse un soldat. Je le dénonce parce qu'il est faible et lâche. J'en fais le sacrifice au fier peuple d'Iran. »
Page 157 : « Quelques coups de feu avaient retenti dans l'aube fraîche, à l'écart du camp : on éliminait les grand blessés, les cas désespérés. »
Page 158 : « Il fallait également compter sur cet épouvantable Cheikh Mamad [le mollah qui avait expédié Reza au front…] . … Avec son réseau de veuves, il vivait comme un pacha et une mort par-ci, par-là devait bien arranger ses affaires. Seulement, j'étais encore en vie… »
Page 159-160 : Mirage, ou fraude pieuse destinée à galvaniser les troupes, au cours d'une avance vers la frontière irakienne, sur la ligne de front : « Et puis ce fut un cri… … Je croyais délirer. … Il était là, dans le soleil, majestueux, sur un merveilleux cheval blanc. Lui aussi était vêtu de blanc. Je ne voyais pas ses traits, car il était encore trop loin, mais cette apparition immaculée sur fond de ciel bleu était étonnante.
Batchaha ! (Mes enfants !)… Man am ! (C'est moi !)… Man Emam Zaman hastam ! (Je suis le Mehdi !)… »
Page 171 : Le bel Imam les conduisait vers un champ de mines… : « Depuis cette journée tragique qui a vu plus de mille cinq cents enfants de douze à quinze ans mourir sur un champ de mines, permettant ainsi, pas le sacrifice de leur vie, aux chars et aux camions de l'armée d'avancer, je n'ai plus jamais versé une larme. »
Pages 180-181 : Découverte du violent racisme anti-arabe dans l'armée iranienne.
Page 193 : Khorramchahr, ville iranienne sur la ligne de front : « Pendant dix-huit mois, la cité avait été bombardée, écrasée, engloutie, laminée par des tonnes de bombes et des dizaines de milliers d'obus en tout genre. Des milliers d'habitants avaient été tués ou enfouis vivants sous les décombres et, quand les hérétiques [les soldats irakiens] étaient enfin entrés, ils avaient pillé, incendié, violé les femmes, brutalisé les enfants. »
Page 197 : « Jamais une seule fois je n'ai mis en doute la moindre parole d'un mollah, d'un officier ou d'un ministre de Téhéran venu dans le Sud [sur le front]. … Ce ne sera que plus tard, dans le silence d'une clinique ou dans un coin d'un camp de prisonniers, que je ferais le bilan de mon aventure… »
Page 198 : Déblayage des ruines de Khorramchar, 7 semaines de travail, et : « Et, malgré les années qui viennent de passer, je revois ces images, ces scènes atroces, et je garde dans ma gorge à tout jamais gravée cette odeur infecte de putréfaction, de sang et de poussière. »
Page 204 : Ramassage de cadavres dans les ruines de Khorramchar : « Les corps des femmes avaient été totalement calcinés : certaines avaient un bras tendu vers le haut, comme si elles avaient voulu se préserver d'un danger, une petite fille avait les jambes écartées, une autre n'avait plus de jambes. Tous les cheveux avaient brûlé, les vêtements aussi : on aurait dit de grosses branches de bois brunies et sculptées de la main d'un homme. »
Page 211 : Ahvaz, ville du Khuzestan iranien, proche du front. Zone de transit et de ravitaillement : « Là, il n'y avait de que des soldats …, et , évidemment - comment pourrais-je les oublier - , des religieux casqués, l'arme à l'épaule, la cartouchière autour du ventre avec - ce qui me surprenait - des baskets aux pieds. »
Reza reçoit un équipement militaire complet et redevient fantassin.
Pages 224 à 226 : Petit accrochage pendant une avancée en territoire iranien : un tireur ambusqué irakien tire quelques balles, sans effets, sur le groupe de fantassins auquel appartient Reza. Colère du sergent commandant la troupe iranienne qui décide de châtier les deux hommes envoyés précédemment en patrouille. « Mettez-vous à genoux, beugla-t-il, à genoux ! Les deux soldats s'exécutèrent. Soudain l'un des deux s'effondra et cria à l'adresse de son supérieur :
Pardonnez-moi, … je vous en prie, pardonnez-moi, je ne le referai plus … !
Il eut à peine le temps de terminer sa phrase qu'une balle lui fracassa le crâne, rejetant sous la violence du choc son corps en arrière…
Alors un tout jeune garçon se leva et courut vers le sous-officier.
- Sarkar sergent…, sarkar sergent, je vous en prie épargnez mon frère, épargnez-le… je n'ai plus que lui au monde…
La scène était intolérable ; personne parmi mes compagnons ne dit mot. Nous étions comme pétrifiés par ce qui se déroulait devans nos yeux.
- Sauvez-lui la vie … Prenez la mienne…
D'une brusque bourrade, le gradé expédia le jeune combattant rouler à trois mètres de lui et, avant que l'enfant ait pu se relever, une détonation retentit, sourde et assassine.
Elle fut suivit d'un cri de douleur : le jeune frère venait de se jeter sur le corps de son aîné.
- Ahmad djan… Ahmad djan… Ahmad, réponds-moi… Je t'en prie, réponds-moi… »
Page 229 : « J'avais cru avoit tout vu, tout subi, tout entendu. J'étais encore loin du compte. L'horreur ne m'était pas encore apparue dans sa totalité, hideuse et puante. »
Page 231-232 : Reza entend des bruits étranges, la nuit, près de lui. Il n'en comprend pas la signification. Il entend les gémissements d'un jeune garçon. « Ce ne sera que bien plus tard que je réaliserai qu'il avait été tout sinplement violé par trois énergumènes ; d'après ce que j'appris par la suite, ce genre d'affaire était assez courante sur le front, les mollah, paraîtrait-il n'étant jamais les derniers pour satisfaire leurs besoins et leurs plus vils instincts. »
Page 234 : Le jeune garçon violé, apathique, se fait tuer la journée suivante. Reza veut le faire enterrer. Un homme lui répond :
- Avance, petit, je t'ai dis… Ne te retourne plus… si c'est pour voir le corps de ce gamin, il n'en vaut pas la peine… Et il se mit à rigoler.
- Mais c'était un de nos compagnons, c'était un jeune soldat comme moi !
Il sourit en me montrant d'hideuses dents jaunâtres :
- Il était arabe…, il n'en vaut pas la peine ! Son père était arabe, à ce que je sais…, de la vermine, tout cela, et un espion sûrement… »
Page 240 : Visite d'un mollah.
« - Et toi, [Reza] Behrouzi, combien en as-tu tué aujourd'hui ?
Je me levai, me mis au garde-à-vous et répondis :
- Un, Excellence.
…
Le gros mollah appuya fortement sa main velue sur ma tête, puis, se tournant vers la centaine d'homme qui m'entourait :
- Si chacun d'entre vous avait seulement tué un chien d'Irakien aujourd'hui, notre bilan serait meilleur. Ce n'est pas le bout du monde que de tuer un seul chien. Pas deux, un seul ! »
Page 256 : « L'armée irakienne avait contre-attaqué, les Iraniens s'étaient repliés et, désormais, je me trouvais seul au milieu de mes ennemis. »
Reza se fait prendre.
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